Les 10 commandements : « Le décor impressionniste. Aux sources des nymphéas »

Culture

Les 10 commandements : « Le décor impressionniste. Aux sources des nymphéas »

Visiter un musée, se rendre à une exposition, apprécier et comprendre l'art sous toutes ses formes,...autant de choses qui peuvent faire peur à priori. Heureusement, les 10 commandements sont là pour vous aider et vous rassurer !

En 1927, l’Orangerie accueillait les célèbres « Nymphéas » de Monet et depuis lors celles-ci ne devaient plus en bouger et devaient faire, en grande partie, la renommée du musée situé jardin des Tuileries. Mis rapidement au pinacle de l’art pictural, les « Nymphéas » ont une fonction éminemment décorative. Ainsi, du 2 mars au 11 juillet 2022, l’Orangerie a décidé de faire un focus sur la réflexion ainsi que le travail des peintres impressionnistes autour de la question de la décoration. 

En effet, si les impressionnistes n’ont pas reçu les commandes officielles espérées pour les mairies, les gares et autres édifices publics qu’érigent le Second Empire et la IIIème République, ils ont toutefois, au fil de leur carrière, réalisé nombre de peintures et d’objets décoratifs. Caillebotte, Cassatt, Cézanne, Monet, Morisot, Pissarro, Renoir mais aussi Marie et Félix Bracquemond et Manet, se sont ainsi essayés à des techniques, formats et motifs variés, redéfinissant chacun(e) à leur manière l’idée même de « décoratif ».

Cet aspect de l’impressionnisme reste en effet largement méconnu et n’a à ce jour jamais fait l’objet d’une exposition. « Le décor impressionniste. Aux sources des Nymphéas » s’interroge sur la part que les artistes ont pu prendre à l’élaboration d’un nouveau langage décoratif au tournant du siècle et examinant pour la première fois les relations aussi complexes que fascinantes, trop longtemps ignorées, entre l’impressionnisme et la décoration.

Au travers des 10 commandements que nous vous proposons, vous devriez avoir l’envie de découvrir les centaines de peintures, dessins et objets, qui révèlent comment les impressionnistes ont tracé un chemin nouveau, guidés par la conviction que, selon le mot de Renoir, l’art est avant tout fait pour « mettre un peu de gaieté sur un mur » !

Les 10 commandements : « Le décor impressionniste. Aux sources des nymphéas » -  -

1er commandement : MISE EN AVANT DES ARTISTES

Si « Les Nymphéas » apparaissent dans le sous-titre de l’exposition, il est important de préciser que celle-ci met en avant la plupart des impressionnistes les plus célèbres. Bien entendu, Monet aura toujours un rôle d’icône du mouvement mais Manet, Renoir, Caillebotte, Cézanne ou encore Pissarro sont tout autant « impressionnants » dans la production et la création à cette époque.

Ainsi, l’exposition fait la part-belle à chacun que cela soit Renoir avec son « Clown au Cirque » ou ses « Grandes Baigneuses », Caillebotte avec ses panneaux décoratifs sur le thème des sports et des loisirs pratiqués en bordure de rivière et son décor inachevé nommée « Parterre de marguerites » , Marie Bracquemond et ses assiettes en faïence édités par Haviland & Cie ou bien Pissarro et ses carreaux de céramique et sa production d’éventails décoratifs.

« La nature est notre seul espoir pour arriver à un art réel et décoratif »

Camille Pissarro

Tweet this

2ème commandement : CITATION

Les 10 commandements : « Le décor impressionniste. Aux sources des nymphéas » - "Pêche à la ligne", "Baigneurs, bord de l'Yerres"", Périssoires" / Triptyque, Huile sur toile / 1878

3ème commandement : A CONTEMPLER

Au cours des années 1870, au fil d’expositions indépendantes, les impressionnistes affichent leurs ambitions dans le domaine de la décoration. Ils y montrent des oeuvres que leurs titres et dimensions désignent comme « décoratives ». Ainsi, dès la deuxième salle de l’exposition, notre regard est happé par un triptyque signé Gustave Caillebotte.

A l’exposition impressionniste de 1879, Caillebotte présente ces trois peintures qu’il décrit comme « panneaux décoratifs ». Ces 3 peintures nous font face et réveillent chez nous des souvenirs de vacances à la campagne où le sport et les loisirs au bord de la rivière font partie du quotidien. La rivière présentée ici est sans doute la Yerres, qui coule près de la demeure familiale du peintre. Ces panneaux étaient peut-être destinés à celle-ci, sans jamais y être installés. Frappant par la modernité du sujet, sa technique et sa composition en triptyque, inspirée de l’estampe japonaise, cet ensemble signale la radicalité des recherches formelles du peintre, et sa volonté de s’affirmer comme « décorateur ».

Les 10 commandements : « Le décor impressionniste. Aux sources des nymphéas » - "Baigneuses" de Pierre Auguste Renoir / Huile sur toile / 1884-1887

4ème commandement : COUP DE COEUR

Si Pierre Auguste Renoir n’est pas l’artiste le plus représenté de l’exposition, celui-ci fait mouche avec sa toile  » Les Grandes Baigneuses ». En face de cette oeuvre et pendant l’espace d’un instant, nous avons cru plongé au coeur de la Galerie des Offices de Florence et de son immense collection consacrée au « Quattrocento ». En effet, celle-ci fait référence à la grande tradition décorative, de Raphaël (1483-1520) et du peintre François Girardon (1628-1715) et s’inspire du bas-relief de l’un des bassins du château de Versailles, « le Bain des Nymphes » (1668-1670).

Ces nus en plein air, au dessin précis, marquent une rupture et un jalon dans l’oeuvre de Renoir. Le tableau fut mal compris par les critiques qui le voient exposé en 1887. Avec son échelle monumentale, sa technique voulant imiter la fresque et son titre, ce tableau a pour Renoir valeur de manifeste décoratif.

On peut aisément affirmer que « Les Baigneuses » est le tableau le plus important du milieu de sa carrière.

Les 10 commandements : « Le décor impressionniste. Aux sources des nymphéas » - "Chrysanthèmes" de Claude Monet / Huile sur toile / 1883

5ème commandement : ZOOM

Un massif de fleurs vu presque à la verticale, sans référence à ses limites : on a l’impression que le tableau « Chrysanthèmes«  de Monet n’a ni haut ni bas. Le peintre s’est attaché à rendre la vibration lumineuse des fleurs sans rechercher la netteté des formes.

Les grosses têtes colorées des chrysanthèmes sont prétexte à représenter des masses de couleurs chaudes, jaunes, blanc-rosé, rouges, tranchant sur un fond froid vert-bleu. Ainsi, elles semblent flotter à la surface de ce bleu, préfigurant les Nymphéas à la surface du bassin.

Il est important de noter que ce tableau s’éloigne de l’aspect figuratif et annonce l’abstraction.

6ème commandement : MOT A RETENIR

Nymphéas : Fleurs et plantes aquatiques de la famille des nymphéacées, Claude Monet leur a conservé leur nom antique, référence aux créatures des eaux, plutôt que de les nommer simplement “nénuphars”. Avec leurs coloris multiples, blancs, rouges ou roses et leur reflets changeants à la surface de l’eau, les nymphéas ont constitué sa dernière grande passion picturale. Leur entretien était particulièrement exigent, plusieurs jardiniers étaient affectés à cette tâche quotidiennement.

Offerts par le peintre Claude Monet à la France le lendemain même de l’armistice du 11 novembre 1918 comme symbole de la paix, les Nymphéas sont installés selon ses plans au musée de l’Orangerie en 1927, quelques mois après sa mort. Cet ensemble unique, véritable « Sixtine de l’impressionnisme », selon l’expression d’André Masson en 1952, offre un témoignage de l’œuvre du dernier Monet conçu comme un véritable environnement et vient couronner le cycle des Nymphéas débuté près d’une trentaine d’années auparavant. L’ensemble est l’une des plus vastes réalisations monumentales de la peinture de la première moitié du XXe siècle.

Beside Sport - Les 10 commandements : « Le décor impressionniste. Aux sources des nymphéas » -  -

7ème commandement : TEXTE EXPOGRAPHIQUE A LIRE

Le texte expographique décrit les objets exposés, mais aide, surtout, le visiteur à saisir l’esprit du tableau.

Au sein de l’exposition « Le décor impressionniste. Aux sources des Nymphéas », on apprend que les oeuvres décoratives réalisées par les peintres impressionnistes, telles que les dessus de portes, les toiles de saltimbanques, les enseignes ou encore les enluminures populaires sont traitées de « peintures idiotes » par Rimbaud dans ses chansons.

 

Beside Sport - Les 10 commandements : « Le décor impressionniste. Aux sources des nymphéas » -  -

8ème commandement : SCENOGRAPHIE

Si la qualité des toiles exposées est indispensable à la réussite d’une exposition, faut-il encore savoir comment les accrocher ? C’est à ce moment précis que la scénographie et le parcours de la visite entrent en ligne de compte. Ainsi, dans cette exposition où doivent cohabiter nombre d’artistes impressionnistes majeurs, la tâche s’avérait délicate. En effet, comment mettre en avant des dessus de portes ou encore des panneaux de portes sans portes ou bien des éventails aux côtés de céramiques ? Et pourtant, le découpage des différentes salles est idéal et à aucun moment, nous nous sommes sentis perdus.

La dernière salle nous offre les premières esquisses de nymphéas signées Monet et s’avère être un parfait trait d’union avec les salles dédiées à cette oeuvre majuscule à l’étage du musée de l’Orangerie. Musée qui est tout simplement surnommé « chapelle Sixtine de l’Impressionnisme » par André Masson !

Beside Sport - Les 10 commandements : « Le décor impressionniste. Aux sources des nymphéas » -  -

9ème commandement : POUR ALLER PLUS LOIN

Afin d’approfondir vos connaissances sur les peintres impressionnistes et sur leur attrait pour la décoration, nous vous conseillons le podcast « La peinture impressionniste est-elle décorative ? » tirer de l’émission « Sans Oser le demander » animée par Matthieu Garrigou-Lagrange et diffusée sur France Culture.

Résumé de l’émission : La question des rapports entre l’impressionnisme et la décoration (ou le décoratif) comporte de nombreuses entrées. Ainsi, elle peut servir à cerner l’originalité de la démarche impressionniste vis-à-vis de la prééminence du sujet et de l’histoire dans la peinture précédente.

Maintenant que les beautés de l’impressionnisme sont plus consensuellement admises, elle ouvre à se demander si la popularité de ce mouvement ne tend pas à le réduire à une peinture d’agrément, en tableaux inoffensifs avec lesquels on décorerait volontiers son salon. Elle permet aussi d’éclairer un pan mal connu des travaux de certains de ces artistes, qui se consacrèrent volontairement à la peinture murale, à des ensembles décoratifs, ou à des commandes de panneaux in situ…

Se poser la question de la décoration à l’intérieur de l’impressionnisme, c’est donc une invitation à réévaluer l’aspect péjoratif que l’on sous-tend d’ordinaire lorsqu’on qualifie un tableau de « décoratif ». Il s’agit justement de considérer que la dimension décorative de l’impressionniste peut être observée dans sa fécondité, et qu’elle a intensément nourri l’œuvre des artistes qui ont participé à ce mouvement.

L’aspect décoratif de la peinture impressionniste permet en somme de réfléchir à nouveaux frais à de nombreux thèmes qui travaillent encore l’art contemporain, et qui puisent leur source dans ce mouvement inaugural de la peinture moderne : l’importance prise par l’expérimentation dans la valeur d’une œuvre, ou même le côtoiement du monde de l’art et de l’industrie du luxe…

10ème commandement : DUREE

L’exposition regroupe 80 peintures, éventails, céramiques ou dessins avec pour la plupart des textes expographiques à lire. De plus, quelques vidéos de plusieurs minutes sont aussi à visionner.

Ainsi, réservez 1 heure pour apprécier à sa juste valeur cette exposition qui vous permettra de voir sous un nouvel oeil l’oeuvre des peintres impressionnistes les plus fameux.

Article : Paul Diey

Crédit Photos : Lucie Brudy

« LE DECOR IMPRESSIONNISTE. AUX SOURCES DES NYMPHEAS » du 2 mars au 11 juillet 2022

Commissariat : 

Sylvie Patry, conservatrice générale, directrice de la conservation et des collections du musée d’Orsay, Paris

Anne Robbins, conservatrice peinture au musée d’Orsay, Paris.

Article suivant

«
BS

Souhaitez vous recevoir des notifications ?

Non merci Oui
X

Vous etes actuellement hors ligne