Jake Gyllenhaal, un instinct d’acteur

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Jake Gyllenhaal, un instinct d’acteur

Discret. Il est là. Son sourire est empreint d’une douceur absolue, et ses yeux bleus révèlent une âme ancienne. Jake sait, sent, voit, palpe le monde qui l’entoure pour le redonner au réalisateur et au spectateur dans un vibrato unique et astral. Portrait intime d’un acteur qui n’a de cesse de peser ses choix artistiques et d’en assumer pleinement la folie, parfois irrévérencieuse…

Les origines et l’enfance sont tou-jours là, tapies en nous. Ce sont elles qui nous portent, nous guident, nous façonnent au gré de nos expériences. Pour Jake Gyllenhaal, né à Los Angeles, il y a d’un côté, ses ancêtres les Vikings. Ceux qui lui ont donné la force d’imposer le respect d’un seul regard glaçant ou d’un rugissement tonitruant. Et de l’autre, la passion intellectualisée et névrosée de ses racines juives new-yorkaises. Celles qui lui apportent des fulgurances d’exubérances dans les larmes et le sang. Capables de nous propulser dans notre humanité la plus universelle. Avec Jake, on est ému dans nos recoins les plus profonds. Sa présence est impactante, dérangeante, remuante longtemps après les rôles qu’il incarne. Toujours différents. Jamais conformes. Adolescent schizophrène, dans Donnie Darko, cow-boy homosexuel dans Le Secret de Brokeback Mountain, ou soldat américain dans Jarhead, la fin de l’innocence, tous ses personnages sont soigneusement choisis par l’acteur qui trace, lentement, mais sûrement, ses sillons dans le cinéma américain. Capable de refuser certains rôles parce qu’il croit en d’autres, Jake Gyllenhaal a ainsi incarné Tommy Cahill dans Brothers, de Jim Sheridan… laissant partir le rôle principal dans Avatar, de James Cameron. Il préfère poursuivre sa vérité au détriment de choix plus commerciaux. Ce sont les productions indépendantes, recherchées, poussées, travaillées dans la matière, qui l’intéressent. Pas le succès. Encore moins les critiques…
Et c’est pour ça qu’il a du succès ! Qu’il est estimé, respecté, valorisé par les réalisateurs qui savent lui donner l’espace de liberté nécessaire pour exprimer sa créativité. Tom Ford l’a ainsi choisi pour incarner deux personnages dans son deuxième film, Nocturnal Animals (sortie en France, le 4 janvier 2017). L’un est écrivain, Edward Sheffield et l’autre, Tony Hastings, est le protagoniste de l’histoire écrite par Edward. Une double performance remarquable et magistrale. Violente et humaine. On est secoué dans les bas-fonds de notre âme. Instantanément, on s’identifie aux affres de la peur, la jalousie, l’angoisse, la sidération, le sentiment d’impuissance bouleversante, qui traversent Tony et Edward. Jake Gyllenhaal a cette capacité subtile à unir retenue et explosion des sentiments. Il dit tout dans ses silences. Et, en une fraction de seconde, il nous embarque dans la peur, la haine, la vengeance, le désespoir. Ses larmes sont les nôtres. Ses hurlements de douleur nous appartiennent. Ses sourires nous redonnent courage et foi.
L’enfance est là. Avoir un père réalisateur et une mère scénariste lui a sûrement donné l’envie de devenir acteur. Mais son talent est inné. Sa liberté est intrinsèque à sa personnalité. Jake passe sur la toile, et on le voit. Parce qu’il sait toucher notre sensibilité. Quand il pleure, c’est un déchirement intérieur que l’on ressent. Dans Nocturnal Animals, quand Tony ou Edward sanglotent leur chagrin incommensurable, on est dévasté. Quand Susan méprise le travail d’écrivain d’Edward, on se sent profondément rejeté, trahi, abandonné. Jake Gyllenhaal a ce pouvoir de transmission puissante des émotions qui habitent ses personnages. Qu’il aime un homme, une femme, ou un enfant… on vit cet amour dans nos entrailles.

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Sa vie privée ne fait pas la Une des tabloïds et c’est tant mieux ! Il a la qualité de la discrétion. Une valeur rare de nos jours. Son jeu d’acteur n’est pas pollué par des histoires d’amour hollywoodiennes qui entacheraient sa réputation. Il a sa vie. Et il a ses personnages. C’est pour ça qu’on l’aime, qu’on l’apprécie et qu’on a plaisir à s’installer dans une salle obscure pour savourer son talent d’artiste. Quand les lumières s’éteignent, on sait que Jake va nous emporter dans une histoire de vie. Une histoire qui aurait pu nous arriver. Une histoire universelle.
Jake Gyllenhaal a une tristesse dans le regard qui ne le quitte jamais. Dès l’instant où il est son personnage, on ressent la profondeur de ce qu’il souhaite exprimer. Sans efforts… A trente-six ans, il a une maturité que son époustouflante filmographie illustre parfaitement. Plus d’une vingtaine de films, avec parfois deux à trois tournages par ans ! Acteur et comédien polymorphe et fécond, il poursuit inlassablement sa route, sur le chemin de son désir. Tout en malaxant savamment les émotions pour nous les restituer puissantes, troublantes, entêtantes. Avec des rôles toujours plus intimes, toujours plus variés, toujours plus pénétrants… pour notre plus grand bonheur à tous. Thank you, Jake.

Interview : Mariem Raïss

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BS

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